Michèle Peyron
Députée de la 9ème circonscription de Seine-et-Marne
Michèle Peyron
Députée de la 9ème circonscription de Seine-et-Marne

Compte rendu audition CESE Commission des affaires sociales, Les addictions au tabac et à l’alcool


« L’alcool et le tabac sont des fléaux qui détruisent des familles », c’est par ces mots que récemment, la Présidente de la commission des affaires sociales Brigitte Bourguignon a débuté une audition de membres du CESE. Nous recevions alors le 10 avril 2019 Etienne Caniard et Marie-José Augé-Caumon, afin qu’ils nous présentent leur avis sur les addictions au tabac et à l’alcool dont ils sont les rapporteurs.

Aussi, en tant que Présidente du groupe d’étude contre les addictions, j’ai conscience qu’il est impératif d’agir afin de prévenir l’usage de ces « drogues licites », drogues qui portent atteinte non seulement à leurs consommateurs, mais également à leurs entourages. J’ai donc étudié avec attention le rapport du CESE qui comporte de nombreuses préconisations. Cette audition a d’ailleurs permis aux députés d’échanger et d’approfondir les sujets développés par les auteurs.

Tout d’abord, les co-rapporteurs partent d’un constat, alors que les politiques publiques visant la prévention du tabagisme ont des effets réels quant à la représentation sociale du tabac, ce n’est pas du tout le cas pour l’alcool. Autrement-dit, grâce à l’interdiction dans les lieux publics du tabac, les Français ont pu prendre conscience de la dangerosité de cette drogue. Or, Etienne Caniard insiste sur le fait que la société n’a pas encore pris la mesure des effets délétères de l’alcool. Pour lors, tous les députés n’étaient pas d’accord avec ce dernier lorsqu’il affirmait en s’appuyant sur des études scientifiques que l’alcool était dangereux dès le premier verre consommé. Restant néanmoins lucide, Etienne Caniard sait qu’il est ô combien improductif et déraisonné de vouloir prohiber la consommation d’alcool. Partant de ce fait, le CESE défend dans son rapport une approche de réduction des risques et non de prohibition de l’alcool.

En s’inspirant de l’exemple de l’Ecosse et dans cette perspective de réduction des risques, Marie-José Augé-Caumon pense qu’un prix plancher pour l’alcool serait une mesure bénéfique à la santé publique, d’autant que pour le tabac, le prix plancher est à l’origine d’une diminution du nombre des fumeurs chez les jeunes. Concluant à la nécessité de cibler les jeunes, les auteurs du rapport jugent par conséquent souhaitable d’établir une politique des prix pour l’alcool. Ainsi, ils proposent d’augmenter les prix de l’alcool dans les boîtes de nuits et « all-inclusive » en permettant à l’eau d’être moins cher que l’alcool (ce qui n’est pas toujours le cas aujourd’hui).

Par ailleurs, les co-rapporteurs suggèrent d’accélérer la prise en charge des personnes en situation d’alcoolisme en démocratisant chez les médecins la technique du RPIB (outil de repérage précoce et d’intervention brève) qui aujourd’hui est très peu utilisée. Cette pratique permettrait alors de déceler plus tôt les situations à risque. Grâce à ce diagnostic précoce, le patient limiterait sur les conseils du médecin sa consommation. Dans ce cas, on réduirait alors les cas de sevrages hospitalisés, car de nombreuses personnes alcooliques n’atteindraient pas un stade critique de dépendance.

Puis en rappelant que les anciens alcooliques ont souvent commencé à boire enfant au sein de leur famille, les auteurs mettent en avant l’importance de changer les représentations sociales de l’alcool. Il est donc important de faire de la prévention auprès des jeunes, car ces adultes de demain ne réitéreront pas les erreurs des anciens en donnant à boire à leurs enfants. De plus, ils proposent de communiquer sur un « droit à ne pas boire » car en société, il est souvent mal vu de ne pas consommer de boissons alcoolisées. La phrase « Ah tu bois pas ? » est justement un témoin de cette culpabilisation sociale. Toutefois, Marie-José Augé-Caumon rapporte à la suite de nombreux entretiens avec des jeunes qu’il est essentiel selon eux de ne pas stigmatiser la jeunesse, si l’on ne veut pas produire l’effet inverse attendu par la prévention. En effet, selon les experts, les jeunes pourraient mal percevoir une prévention trop radicale.

De surcoît, les co-rapporteurs soulignent que lier les producteurs d’alcools à la prévention est extrêmement problématique. Ainsi, quand on sait que 90% des ventes des alcooliers sont faites auprès des consommateurs addicts, il est économiquement illusoire de croire que les producteurs ont intérêt à prévenir sur les dangers de l’alcool. En outre, les co-rapporteurs pensent qu'associer les alcooliers à la prévention améliore plutôt l'image de la corporation. Il est donc nécessaire d'écarter les producteurs d'alcool de toute prévention officielle. Finalement, pour les membres du CESE, les succès des politiques publiques visant la prévention du tabagisme ne doivent pas faire oublier qu’il reste beaucoup à faire pour ce qui est de l’alcool. En effet, selon eux, il est primordial tout en ne relâchant pas les efforts sur le tabac, de se concentrer sur la prévention de l’alcoolisme.

 

 

Echanges avec les députés :

En réaction aux propos de Marie Josée Augé-Caumon, un député MODEM pense qu’établir un prix plancher serait une mesure injuste, car elle affecterait en premier lieu les personnes modestes.

A l’inverse pour un député LFI, les personnes modestes sont les premières victimes de l’alcool (et encore plus en outre-mer). Il propose alors dans un contexte où la loi Evin a été détricotée d’interdire totalement la publicité de l’alcool. Il suggère en outre de faire des territoires d’outre-mer, le lieu d’expérimentation de cette mesure.

En ce qui concerne les Républicains, ils jugent le rapport du CESE comme étant un travail sans nuance. Ils tiennent à défendre le patrimoine français que représente le savoir-français viticole, le vin consommé modérément serait même bon pour la santé selon eux.

Enfin, une députée LREM tient à ce que les politiques publiques de prévention ciblent davantage les femmes enceintes en rationalisant la prise en charge de celles-ci par les acteurs de santé.

En fin de compte, les co-rapporteurs ont souhaité rappeler que ce n’est pas le rôle du CESE de légiférer. Le rapport du CESE fournit toutefois de précieux éléments aux députés afin qu’ils appréhendent efficacement les enjeux de la lutte contre les addictions. Du reste, Etienne Caniard conclut qu’une politique publique doit s’appuyer sur la réalité des dangers et non pas sur la représentation des dangers. Or, il est prouvé scientifiquement que l’alcool est dangereux. Il est donc du devoir des députés d’amender afin de mieux prévenir « le fléau qu’est l’alcoolisme ».


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